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Place du travail par rapport au couple et à la famille

15 novembre 2008 Repères chrétiens
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De nombreuses études montrent que les relations de couples et les conflits travail/vie personnelle sont d’importantes causes de détresse personnelle et professionnelle, du manque de concentration, de la baisse de productivité et des coûts liés à l’absentéisme et aux problèmes de santé. A l’inverse les problèmes professionnels ou les difficultés relationnelles au travail peuvent avoir une influence sur la vie familiale…

Les employeurs ont la possibilité d’agir à travers une politique sociale qui prend en compte les contraintes de la vie conjugale et familiale de leurs salariés. Ils peuvent également former certains de leurs cadres ou agents de maîtrise pour les sensibiliser aux besoins relationnels des personnes dont ils ont la responsabilité. De leur côté, les salariés peuvent améliorer leur vie relationnelle, en consacrant du temps à la communication, en agissant de manière à consolider leur vie familiale et conjugale.

La réflexion sur la place du travail par rapport au couple et à la famille met en évidence deux paradoxes :

    • La valeur « famille », l’aspiration à vivre en couple conçu comme un foyer chaleureux, semble progresser dans notre société mais parallèlement, la notion de famille se complexifie et se précarise, avec toutes les conséquences que l’on connaît sur l’équilibre des enfants. Le couple est devenu une entité fragile, le nombre des séparations et des divorces augmente.
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    • Plus le travail est bien vécu, épanouissant et passionnant à titre personnel, plus la stabilité de la vie familiale et /ou de la vie du couple risque d’en souffrir en raison d’un surinvestissement professionnel.

Beaucoup de causes sociétales sont en jeu et il n’est pas facile d’évaluer la part de responsabilité du travail sur ces phénomènes.
Toutefois, on ne peut nier les interactions entre conditions de travail, vie de couple et vie de famille. Ainsi en est-il du choix d’assez nombreux jeunes couples de restreindre leur désir d’enfant et de différer la création d’une famille, voire même d’engager une relation stable dans la durée, dans l’attente de meilleures conditions matérielles sécurisées par leur évolution professionnelle.

Les problèmes personnels ont une influence sur le comportement de la personne dans sa vie professionnelle.

Mais d’un autre point de vue, le travail n’est pas forcément responsable de tous les problèmes conjugaux et familiaux, des dépressions, de l’alcoolisme, du manque d’estime de soi qui ont évidemment une influence sur le comportement de la personne dans sa vie professionnelle.

L’observation de ce qui se passe sur le terrain permet de dresser un tableau des grandes tendances de l’évolution des conditions travail et de leur impact sur la vie de couple et la vie de famille à l’heure actuelle :

Au sujet des horaires de travail

Les «35 heures» n’ont pas été un facteur positif pour la vie de famille. L’annualisation et la modulation du temps de travail a conduit à des horaires aléatoires préjudiciables pour la régularité et l’organisation de la vie familiale. L’extension du forfait journalier, les horaires à la carte, les horaires variables, s’ils permettent plus de souplesse et des accords « gagnant/gagnant », peuvent aussi générer des situations de stress s’ils ne sont pas appliqués avec discernement et intelligence. D’autant plus que, dans certains cas les salariés doivent faire face à une production en 35 heures équivalente ou presque à celle qu’ils assuraient en 40 heures.

L’impact des réductions d’effectifs et des restructurations permanentes sur la famille

Le souci des entreprises de baisser les coûts de production se traduit par une augmentation de la charge de travail des salariés avec un débordement de la vie de travail sur la vie de famille.

Ce contexte crée aussi des situations d’angoisse, de fatigue et de stress pouvant conduire certains à des actes de désespoir.

La mobilité géographique : une contrainte qui peut être lourde

Même si c’est une nécessité dans certains métiers ou dans certaines circonstances, c’est une contrainte lourde, surtout si la situation familiale et les aspirations de la personne et de son conjoint ne sont pas prises en considération. Ni l’entreprise, ni la personne concernée et sa famille n’ont intérêt à laisser dans le non-dit les risques potentiels d’éclatement de la cellule familiale, de perturbation des enfants (notamment à l’adolescence), de fragilisation du couple.

Au sujet des nouvelles technologies : effacement des frontières entre vie privée et vie professionnelle

Elles provoquent une sorte de décloisonnent de la vie personnelle. Les frontières entre le temps consacré au travail et le temps personnel et familial ont tendance à s’effacer. Ce que certains appellent « la laisse électronique » permet de travailler chez soi ou en vacances par téléphone ou Internet, de sorte qu’il n’y a plus de vraie coupure entre vie personnelle et vie de travail. La relation conjugale et familiale s’appauvrit et peut disparaître.

En regard de ce constat, les personnes impliquées dans le travail social apportent un complément d’éclairage issu de leur expérience personnelle ou de leur pratique.

Le désir des personnes serait que la vie privée et vie au travail soient bien séparées

D’une façon générale il ressort que le désir profond des personnes et des couples, leur idéal en quelque sorte, serait que vie privée et vie au travail soient bien séparées, cloisonnées. Mais force est de constater que dans la réalité elles sont solidement imbriquées. Bien plus, à l’écoute des couples, certains conseillers conjugaux remarquent que les attentes, les désirs, les sentiments, les difficultés, exprimés par les conjoints par rapport à la vie professionnelle présentent des similitudes frappantes avec les attentes, les désirs, les sentiments, les difficultés relatifs à la vie conjugale et familiale.

Chacun est donc confronté, sa vie durant à ce qui est parfois un combat, pour trouver, avec sagesse, un juste équilibre entre vie de travail et vie personnelle. Les choix, les arbitrages nécessaires peuvent être difficiles mais ne présentent pas que des inconvénients.

Témoignage du soutien de la famille  : « Ma famille a été un bon support pendant les moments difficiles, notamment lorsque j’ai connu une longue période de chômage… »

Ainsi, Marc, ingénieur dans un important bureau d’études, témoigne en ces termes : « Ma famille a été un bon support pendant les moments difficiles, notamment lorsque j’ai connu une longue période de chômage, ou lors d’importantes décisions pour l’évolution de ma carrière, réagissant sur la vie familiale. »

Les familles qui s’en sortent le mieux semblent être celles où le travail est un sujet de communication familiale régulier, surtout lorsque les deux conjoints aspirent à faire carrière. L’échange des parents avec leurs enfants sur la réalité de leur vécu au travail aussi bien en ce qui concerne les difficultés que les satisfactions, les sentiments éprouvés, les motivations, la place de l’argent, sans rester dans la plainte ou la critique, apporte à chacun une vision juste et souvent valorisante du travail.

Le travail des femmes est considéré, selon les cas comme une nécessité financière ou un facteur important d’équilibre personnel.

Beaucoup de femmes trouvent un équilibre entre l’intérêt pour leur travail, la reconnaissance sociale qu’elles en retirent et la satisfaction de leur désir d’enfants.

Le constat des conseillers conjugaux est qu’une femme qui a l’ambition d’accéder à des postes de hautes responsabilités n’hésite pas, en général, à sacrifier son désir d’enfant et se limite à une seule maternité.
Ce n’était pas, jusqu’à présent du moins, le cas le plus courant. Beaucoup de femmes trouvent un équilibre entre l’intérêt pour leur travail, la reconnaissance sociale qu’elles en retirent et la satisfaction de leur désir d’enfants. Elles adaptent leurs horaires et le choix de leur métier pour rester des mères suffisamment bonnes suivant en cela, inconsciemment sans doute, ce que préconisait le psychanalyste Donald WINNICOT.

Dans ce contexte, l’évolution du fonctionnement des couples et du rôle de père ou de mère est, en général, perçue comme positive tant en ce qui concerne l’éducation des enfants, le partage des tâches domestiques, qu’en ce qui concerne la communication des conjoints, notamment pour la compréhension réciproque de ce qui se vit au travail.

Travail et couple : une communication conjugale d’autant plus nécessaire

Aujourd’hui les hommes sont plutôt fiers d’avoir des femmes qui travaillent mais la communication conjugale est d’autant plus nécessaire que le rythme et le mode de vie qui en résulte peut parfois créer des contraintes fortes ou des tentations d’aventures extra-conjugales, au détriment de l’équilibre du couple.

Pour les jeunes filles qui ont aujourd’hui 20 ans, la tendance qui est perçue est qu’elles sont plutôt tentées par la réussite de leur carrière professionnelle au prix du sacrifice de leur désir de maternité. Mais qu’en sera-t-il réellement quand il leur faudra choisir ? Leur partenaire aura sans doute son mot à dire.

Des hommes et des femmes souvent écartelés entre leur vie professionnelle et leurs désirs

En conclusion de cette réflexion sur la place du travail par rapport à la vie de couple et à la famille, le sentiment qui domine est peut-être celui d’écartèlement. Les femmes et les hommes de notre temps sont souvent écartelés entre les contraintes de leur vie professionnelle et leur désir profond de goûter pleinement les richesses de la vie de couple et de famille.

Aurions-nous donné, même inconsciemment, au travail un tel pouvoir qu’il serait devenu un concurrent redoutable et destructeur de la vie familiale ?

Amener les personnes à réfléchir sur leurs priorités ?

Avant d’interroger l’entreprise sur sa possible contribution à la résolution de cet enjeu majeur pour notre société, ne faut-il pas amener d’abord les personnes, les couples, les familles à bien définir leurs priorités, à réfléchir sur leurs propres responsabilités ?

Laisserons-nous le travail nous dicter une sorte de loi de la jungle ou serons-nous capables de lui fixer les limites nécessaires afin qu’il devienne, pour les femmes et les hommes d’aujourd’hui, une aide à grandir en humanité ?

Dans un récent débat rapporté par le Figaro Magazine du 25 octobre 2008, à propos du travail du dimanche entre M. Luc CHATEL, Secrétaire d’État chargé de l’Industrie et de la Consommation et Mgr Jean-Charles DESCUBES, Archevêque de Rouen, président pour les questions familiales et sociales au sein de la Conférence des Évêques de France, ce dernier rappelait avec fermeté le message évangélique : « La personne humaine doit être au centre de nos préoccupations, tant dans son travail que dans sa dimension sociale et spirituelle. (Le travail est légitime) à condition de ne pas mutiler l’homme dans sa dimension spirituelle »

 

Extrait d’un rapport rédigé en vue du Colloque organisé par le CLER Amour et Famille le 15 novembre 2008 sur le thème Vie de couple, vie de famille, vie professionnelle : comment ? Le mouvement des EDC était un des partenaires.




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