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La justice sociale, un élément clé de la pensée sociale chrétienne

10 septembre 2019 Repères chrétiens
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« La recherche du bien commun dans un esprit de service, le développement de la justice avec une attention particulière aux situations de pauvreté et de souffrance, le respect de l’autonomie des réalités terrestres, le principe de subsidiarité, la promotion du dialogue et de la paix dans la perspective de la solidarité : telles sont les orientations auxquelles l’action politique des chrétiens laïcs doit s’inspirer ». Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église, §565

 

« La justice est un thème central dans l’enseignement social de l’Église. Les accents ont évolué dans le temps, en fonction du contexte politique, économique et social. Car avant d’être une question théorique, la justice est une question pratique qui émerge du scandale de la pauvreté qui déchire le tissu social. Elle s’est posée avec une acuité nouvelle avec la révolution industrielle. Elle a connu de nouveaux développements avec l’extension des échanges économiques au niveau mondial. (…)


Dans la pensée sociale chrétienne, les injustices sont la conséquence du péché de l’homme, mais d’un péché qui s’est cristallisé dans les institutions – ce que Jean Paul II appelle les « structures de péché » – qui contribuent à la reproduction des injustices.


De ce fait, le combat pour la justice exige davantage que la conversion personnelle : celle-ci doit conduire à œuvrer en faveur d’une réforme des structures et des institutions. Et cette justice qu’il s’agit de promouvoir est toujours articulée avec d’autres valeurs, notamment la charité. L’enseignement magistériel souligne que la véritable justice exige d’être toujours « en excès », un excès du bien qui seul peut permette de vaincre l’excès de mal. »

 

Dominique Greiner, aa
 https://www.doctrine-sociale-catholique.fr/quelques-themes/94-justice-sociale

 

« La vie en société doit être considérée avant tout comme une réalité d’ordre spirituel. Elle est, en effet, échange de connaissances dans la lumière de la vérité, exercice de droits et accomplissement de devoirs ; émulation dans la recherche du bien moral ; communion dans la noble jouissance du beau en toutes ses expressions légitimes ; disposition permanente à communiquer à autrui le meilleur de soi-même et aspiration commune à un constant enrichissement spirituel. Telles sont les valeurs qui doivent animer et orienter toutes choses : activité culturelle, vie économique, organisation sociale, mouvements et régimes politiques, législation, et toute autre expression de la vie sociale dans sa continuelle évolution. »

Pacem in terris, 1936 §51

 

« Une chose demeure acquise : l’action de l’État en matière économique, si loin qu’elle porte, si profondément qu’elle atteigne les ressorts de la société, ne peut supprimer la liberté d’action des individus ; elle doit au contraire la favoriser pourvu que soient sauvegardés les droits essentiels de chaque personne humaine. » Mater et magistra, 1961, §5

 

« La justice est la première voie de la charité ou, comme le disait Paul VI, son « minimum » [2], une partie intégrante de cet amour en « actes et en vérité » (1 Jn 3, 18) auquel l’apôtre saint Jean exhorte. D’une part, la charité exige la justice : la reconnaissance et le respect des droits légitimes des individus et des peuples. Elle s’efforce de construire la cité de l’homme selon le droit et la justice. D’autre part, la charité dépasse la justice et la complète dans la logique du don et du pardon [3]. La cité de l’homme n’est pas uniquement constituée par des rapports de droits et de devoirs, mais plus encore, et d’abord, par des relations de gratuité, de miséricorde et de communion. La charité manifeste toujours l’amour de Dieu, y compris dans les relations humaines. Elle donne une valeur théologale et salvifique à tout engagement pour la justice dans le monde. » Caritas in veritate, 2009, §6

 

« Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous empêcher de reconnaître qu’une vraie approche écologique se transforme toujours en une approche sociale, qui doit intégrer la justice dans les discussions sur l’environnement, pour écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres. » Laudato si, 2015, §49

 

« Dans les conditions actuelles de la société mondiale, où il y a tant d’inégalités et où sont toujours plus nombreuses les personnes marginalisées, privées des droits humains fondamentaux, le principe du bien commun devient immédiatement comme conséquence logique et inéluctable, un appel à la solidarité et à une option préférentielle pour les plus pauvres. Cette option implique de tirer les conséquences de la destination commune des biens de la terre, mais, comme j’ai essayé de l’exprimer dans l’Exhortation apostolique Evangelii gaudium,[123] elle exige de considérer avant tout l’immense dignité du pauvre à la lumière des convictions de foi les plus profondes. Il suffit de regarder la réalité pour comprendre que cette option est aujourd’hui une exigence éthique fondamentale pour la réalisation effective du bien commun. » Laudato si, 2015, §158

 

La théologie protestante


« On a pu décrire l’éthique protestante comme une éthique à deux foyers : éthique de la liberté, elle est toujours aussi éthique de la justice. Jamais l’une sans l’autre. La liberté sans la justice est inopérante, la justice sans la liberté est étouffante. La liberté est au centre de l’éthique protestante, mais précisément elle est inséparable d’une double transcendance : de l’altérité de Dieu, de l’altérité de l’autre, du prochain.

 

L’éthique protestante insiste plus fortement aujourd’hui sur la catégorie de responsabilité. Il n’est plus possible en effet de simplement opposer l’éthique de conviction à celle de responsabilité, comme on le fait parfois à la suite de Max Weber. L’insistance sur la responsabilité implique la reconnaissance de la priorité de la liberté ; la responsabilité a pour tâche de respecter l’articulation de la liberté et de la justice ; elle ne présuppose pas d’abord un bien commun, comme la tradition aristotélicienne et thomiste, mais postule que la confiance primordiale faite à la liberté et à la justice appelle l’exercice d’une responsabilité constructive. On ne part pas ici du Bien pour aller aux actes, mais de l’acte de la responsabilité comme service des valeurs de la liberté et de la justice. Le modèle n’est pas d’harmonie sociale mais de construction solidaire. À la différence de la morale sociale catholique, qui déduit le Bien commun de la loi naturelle, l’éthique sociale protestante préfère la notion de société responsable, en quête de la reconnaissance des valeurs constitutives. »

In Une vision protestante de l’éthique sociale. Questions de méthode et problèmes de fond, 1993, Denis Müller

 

« L’organisme économique et social sera sainement constitué et atteindra sa fin, alors seulement qu’il procurera à tous et à chacun de ses membres tous les biens que les ressources de la nature et de l’industrie, ainsi que l’organisation vraiment sociale de la vie économique, ont le moyen de leur procurer. Ces biens doivent être assez abondants pour satisfaire aux besoins d’une honnête subsistance et pour élever les hommes à ce degré d’aisance et de culture qui, pourvu qu’on en use sagement, ne met pas obstacle à la vertu, mais en facilite au contraire singulièrement l’exercice  »

Quadragesimo anno, 1931, §37

 

« En effet, outre la justice commutative, il y a aussi la justice sociale, qui impose des devoirs auxquels patrons et ouvriers n’ont pas le droit de se soustraire. C’est précisément la fonction de la justice sociale d’imposer aux membres de la communauté tout ce qui est nécessaire au bien commun.
Mais de même que dans l’organisme vivant on pourvoit aux besoins du corps entier en donnant à chacune des parties et à chacun des membres ce qu’il leur faut pour remplir leurs fonctions, ainsi dans l’organisme social, pour assurer le bien commun de toute la collectivité, il faut accorder à chacune des parties et à chacun des membres, c’est-à-dire à des hommes qui ont la dignité de personnes, ce qui leur est nécessaire pour l’accomplissement de leurs fonctions sociales. La réalisation de la justice sociale produira une activité intense de toute la vie économique, dans la paix et dans l’ordre, manifestant ainsi la santé du corps social, tout comme la santé du corps humain se reconnaît à l’harmonieuse et bienfaisante synergie des activités organiques. »

Divini Redemptoris, 1937, §51

 

La dignité humaine fonde également le droit de déployer l’activité économique dans des conditions normales de responsabilité personnelle. Il en résulte aussi – et il convient de le souligner – qu’à l’ouvrier est dû un salaire à déterminer selon les normes de la justice ; compte tenu des possibilités de l’employeur, cette rémunération devra permettre au travailleur et à sa famille un niveau de vie conforme à la dignité humaine.

Pacem in terris, 1963, §20

 

« Mais s’il est vrai qu’un certain capitalisme a été la source de trop de souffrances, d’injustices et de luttes fratricides aux effets encore durables, c’est à tort qu’on attribuerait à l’industrialisation elle-même des maux qui sont dus au néfaste système qui l’accompagnait. Il faut au contraire en toute justice reconnaître l’apport irremplaçable de l’organisation du travail et du progrès industriel à l’œuvre du développement. »

Populorum Progressio, 1967, §26

 

« Notre seconde recommandation est pour ceux que leurs affaires appellent en pays récemment ouverts à l’industrialisation : industriels, commerçants, chefs ou représentants de plus grandes entreprises. Il arrive qu’ils ne soient pas dépourvus de sens social dans leur propre pays : pourquoi reviendraient-ils aux principes inhumains de l’individualisme quand ils opèrent en pays moins développés ? Leur situation supérieure doit au contraire les inciter à se faire les initiateurs du progrès social et de la promotion humaine, là où leurs affaires les appellent. Leur sens même de l’organisation devrait leur suggérer les moyens de valoriser le travail indigène, de former des ouvriers qualifiés, de préparer des ingénieurs et des cadres de laisser place à leur initiative, de les introduire progressivement dans les postes plus élevés, les préparant ainsi à partager avec eux dans un avenir rapproché, les responsabilités de la direction. Que, du moins, la justice règle toujours les relations entre chefs et subordonnés. Que des contrats réguliers aux obligations réciproques les régissent. Que nul enfin, quelle que soit sa situation, ne demeure injustement soumis à l’arbitraire.

Populorum progressio, 1967, §70

 

Le travail est plus qu’une manière de gagner sa vie ; c’est une forme de participation continue à la création de Dieu. Si la dignité du travail doit être protégée, les droits fondamentaux qui sont le privilège des travailleurs doivent aussi être respectés -le droit à un travail productif, à un salaire convenable et juste, le droit d’organiser des syndicats et d’y adhérer, le droit à la propriété privée et à l’initiative économique

Réflexion des évêques catholiques des USA, 1998

 

« La mobilité du travail, liée à la déréglementation généralisée, a été un phénomène important, qui comportait des aspects positifs par sa capacité à stimuler la création de nouvelles richesses et l’échange entre différentes cultures. Toutefois, quand l’incertitude sur les conditions de travail, en raison des processus de mobilité et de déréglementation, devient endémique, surgissent alors des formes d’instabilité psychologique, des difficultés à construire un parcours personnel cohérent dans l’existence, y compris à l’égard du mariage. Cela a pour conséquence l’apparition de situations humaines dégradantes, sans parler du gaspillage social. Si l’on compare avec ce qui se passait dans la société industrielle du passé, le chômage entraîne aujourd’hui des aspects nouveaux de non-sens économique et la crise actuelle ne peut qu’aggraver une telle situation. La mise à l’écart du travail pendant une longue période, tout comme la dépendance prolongée vis-à-vis de l’assistance publique ou privée, minent la liberté et la créativité de la personne ainsi que ses rapports familiaux et sociaux avec de fortes souffrances sur le plan psychologique et spirituel. Je voudrais rappeler à tous, et surtout aux gouvernants engagés à donner un nouveau profil aux bases économiques et sociales du monde, que l’homme, la personne, dans son intégrité, est le premier capital à sauvegarder et à valoriser : « En effet, c’est l’homme qui est l’auteur, le centre et la fin de toute la vie économico-sociale »

Laudato si, 2015, §25

 




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