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La subsidiarité dans l'évangile de Luc
La subsidiarité fait toujours grandir : elle est au service des personnes. Jésus laisse les disciples se débrouiller pour résoudre le problème qu’ils ont eux-mêmes identifié. Il intervient dans ce qu’ils sont incapables de faire, et c’est là qu’apparaît la dimension de « subside ».
Luc 9, 10-17
10 A leur retour, les apôtres lui racontèrent tout ce qu’ils avaient fait. Les prenant alors avec lui, il se retira à l’écart, vers une ville appelée Bethsaïde.
11 Mais les foules, ayant compris, partirent à sa suite. Il leur fit bon accueil, leur parla du Royaume de Dieu et rendit la santé à ceux qui avaient besoin de guérison.
12 Le jour commença à baisser. S’approchant, les Douze lui dirent: « Renvoie la foule, afin qu’ils aillent dans les villages et fermes d’alentour pour y trouver logis et provisions, car nous sommes ici dans un endroit désert. »
13 Mais il leur dit: « Donnez-leur vous-mêmes à manger. » Ils dirent: « Nous n’avons pas plus de cinq pains et de deux poissons. A moins peut-être d’aller nous-mêmes acheter de la nourriture pour tout ce peuple. »
14 Car il y avait bien 5.000 hommes. Mais il dit à ses disciples: « Faites-les s’étendre par groupes d’une cinquantaine. »
15 Ils agirent ainsi et les firent tous s’étendre.
16 Prenant alors les cinq pains et les deux poissons, il leva les yeux au ciel, les bénit, les rompit et il les donnait aux disciples pour les servir à la foule.
17 Ils mangèrent et furent tous rassasiés, et ce qu’ils avaient eu de reste fut emporté: douze couffins de morceaux !
Dieu est subsidiaire à l’homme : mission des disciples et principe d’autonomie
L’application du principe de subsidiarité consiste à reconnaître d’abord la dignité des personnes qui sont appelées à se comporter en « ministres de la providence divine », comme le rappelle le Catéchisme de l’Église catholique (§1884).
Lors de la multiplication des pains, Jésus demande aux disciples de nourrir les foules. Simple délégation, pourrait-on penser. Mais ce serait aller un peu vite. Dans le Nouveau Testament, nous sommes dans le régime de la grâce et les disciples sont institués comme d’autres Christ. Regardons de près le récit de la multiplication des pains d’après l’évangile de Luc, qui paraît le plus détaillé (Lc 9, 10-17).
Remarquons d’abord que dans l’évangile de Luc, ce sont les disciples qui ont l’initiative. Ils identifient un problème d’intendance lié à la présence de la foule. Ils cherchent des solutions. Ce sont eux qui soulèvent le problème et cherchent à le résoudre. Certes, ils ont pour cela besoin du Maître. La première solution qu’ils envisagent consiste à demander à Jésus de renvoyer la foule. Mais Jésus ne veut pas se substituer aux disciples pour résoudre lui-même le problème : « Donnez-leur vous-même à manger ! »
Les douze ont dû être stupéfaits d’une telle parole. L’incompréhension les rend muets d’étonnement. Ils ne parviennent qu’à confesser leur pauvreté en moyens matériels. La deuxième solution qu’ils envisagent alors consiste à aller acheter de la nourriture. Jésus invite alors les disciples à faire s’étendre les gens. Remarquons que Jésus n’est le sujet d’aucune action dans le récit, en dehors de la bénédiction et du rapport aux disciples. Il ne dit rien aux foules et ne commande rien, il n’apporte rien. Il ne fait aucun commentaire.
Ajoutons qu’il ne s’agit pas seulement d’un acte matériel mais d’une institution des disciples comme agents de la providence. Après le départ du Maître, ils continueront de nourrir les foules par la parole et la fraction du pain en rendant le Christ présent. Il y a là une pédagogie de Jésus pour former ses disciples, pour en faire non des serviteurs mais des amis. Il ne s’agit pas tant de délégation comme s’il se déchargeait sur les disciples d’une tâche fastidieuse, mais il les institue comme ses collaborateurs, et pourrait-on même dire, comme ses successeurs. Jésus institue ses disciples dans un rôle nouveau qui préfigure l’Église.
La subsidiarité fait toujours grandir : elle est au service des personnes. Jésus laisse les disciples se débrouiller pour résoudre le problème qu’ils ont eux-mêmes identifié. Il intervient dans ce qu’ils sont incapables de faire, et c’est là qu’apparaît la dimension de « subside ». Mais ce sont les disciples qui donnent eux-mêmes à manger pour manifester quelque chose de leur rôle, ce rôle qu’ils commencent à découvrir, en tant que futures colonnes de l’Église. Tentés de trouver une solution certes raisonnable (renvoyer la foule), mais qui aurait eu l’inconvénient d’éparpiller les fidèles, Jésus les envoie au contraire vers eux, ce qui est conforme à leur mission. Il est vrai que c’est Jésus qui multiplie les pains et les poissons. Mais ce n’est pas le point final de la mission des disciples : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que je fais ; et il en fera même de plus grandes, parce que je vais vers le Père. » (Jn 14, 12)
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