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La mélodie des Béatitudes – homélie du père Vincent Cabanac
Les Béatitudes sont comparables à une partition pour laquelle Jésus donnerait le « la ». C’est sur ce refrain que s’est achevée dimanche 17 février 2019 l’homélie du père Vincent Cabanac, conseiller spirituel national des EDC, lors d’une messe retransmise par l’émission Le Jour du Seigneur – CFRT – en l’abbaye trappiste Notre-Dame d’Aiguebelle, maison-mère de la communauté des moines de Tibhirine dans la Drôme. En voici la trnascription, aimablement autorisée par le Jour du Seigneur.
« A quatre reprises, Jésus nous veut du bien : « Heureux vous ! », dit-il…
Mais il nous surprend : Chaque fois, ses bénédictions sont associées à ce que nous redoutons : la pauvreté, la faim, la tristesse et même la haine dont on serait victime.
Et pire encore avec les malédictions qui affecteraient les gens riches, rassasiés, souriants et jouissant d’une reconnaissance sociale. Les heureux deviennent malheureux…
Ces contrepoints sont incompréhensibles, voire inadmissibles.
On nous promet ce qu’on n’espère jamais voir advenir…
Serait-ce une menace qui nous guette ? Comment être heureux en souffrant ?
Jésus vient nous consoler et nous aider à percevoir ce qu’il va accomplir pour nous et par nous. Il met d’abord en valeur des personnes. Et il lance un appel : le détachement est une source d’enrichissement humain et spirituel alors que la détention devient parfois une prison : est-ce que je ne deviens pas esclave de mon désir de posséder ?
Saint Paul, dès le début de sa première Lettre aux Corinthiens nous précise envers qui le Seigneur est attentif : « ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas, voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est ».
L’attention de Dieu se porte sur les plus humbles.
C’est bien pourquoi, dans l’évangile de Luc, Jésus part des réalités bien concrètes, sans se référer tout de suite à une perception spirituelle détachée de la vie quotidienne.
Luc a considéré combien les premières communautés primitives ont souffert d’indigence, de marginalisation, de persécution à cause de leur foi au Christ et de l’attente du Royaume de Dieu.
Il dit bien les souffrances de ses contemporains : « vous qui avez faim maintenant, … vous qui pleurez maintenant » et cela est encore le cas aujourd’hui dans tant de lieux dont la liste semble infinie : Syrie, Soudan, Somalie, Yémen, Birmanie… et même chez nous en France, en Belgique et en Europe où la précarité affecte des familles, des personnes âgées et isolées.
Toutefois, percevons les signes de la présence de Dieu et comme nous venons de l’entendre dans l’épitre de St Paul,
« Si nous avons mis notre espoir dans le Christ pour CETTE vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes ».
Le Christ illumine notre horizon qui s’élargit à un avenir plein d’espérance, si nous nous ouvrons à lui.
Une bien belle expression de la force spirituelle de ces versets se trouve dans une lettre de Frère Luc, moine de Tibhirine, entré dans la vie monastique ici-même à Aiguebelle. Ce martyr d’Algérie, récemment béatifié, écrivait :
« Aussi longtemps que nous faisons de notre vie un but en soi, ne subsiste aucune raison de vivre, car tout se termine par la mort. C’est dans le Christ que nous découvrons le sens profond de notre vie. Ce que Dieu demande est que nous Lui fassions confiance à Lui et au Christ » (Frère Luc, Lettre de janvier 1994).
Cette confiance se développe quand on cherche à se conformer au Christ, à se mettre en syntonie avec lui, à faire nôtres les béatitudes.
En écoutant nos frères trappistes d’Aiguebelle nous introduire dans la prière par leur chant, une image me vient à l’esprit.
Les béatitudes sont comparables à une partition. Jésus a composé puis entonnée ce thème musical à huit notes. Quatre bénédictions et quatre malédictions dit-on…. Elles nous permettent de poser notre voix, de nous ajuster à celle du Christ et de comprendre comment fonder notre existence sur lui seul en nous départant de toute fioriture, de toute vaine gloire, de tout arrangement musical qui viendrait couvrir nos voix.
Quand nos frères moines chantent en grégorien, dans la grande tradition de l’Église latine, ils le font en chœur et à l’unisson. Ils manifestent ainsi qu’ensemble ils chantent la mélodie de l’évangile. De façon épurée, ils répondent à l’exigence d’interpréter avec justesse ce que le Christ nous met à l’oreille et donc au cœur.
Nous pouvons tous devenir des bons interprètes de la mélodie divine, chacun avec son tempo, son rythme mais toujours dans le ton de Jésus.
Depuis 2000 ans, la partition évangélique n’a pas changé.
N’hésitons jamais à l’entonner afin de rendre notre vie plus harmonieuse.
Pour vivre les béatitudes, ayons confiance, le Christ nous donne le la, la note juste… »
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