La solidarité, une communion entre les hommes, à l’image de la vie divine
Le but de la Pensée Sociale Chrétienne est de construire la
civilisation de l’amour.
La mise en œuvre de la solidarité ne doit donc jamais perdre de vue que : « Le comportement de la personne est pleinement humain quand il naît de l’amour, manifeste l’amour, et est ordonné à l’amour. Cette vérité est également valable dans le domaine social : il faut que les chrétiens en soient des témoins profondément convaincus et sachent montrer, par leur vie, que l’amour est la seule force (cf. 1 Co 12, 31-14, 1) qui peut conduire à la perfection personnelle et sociale et orienter l’histoire vers le bien » (Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église, §580).
La solidarité est donc une mise en acte de la charité. La charité a sa source en Dieu. La solidarité devient ainsi un chemin vers Dieu, un chemin de transcendance pour une plus grande communion des hommes entre eux. « Humanité veut dire appel à la communion interpersonnelle, car l’image et la ressemblance du Dieu trinitaire sont la racine de tout l’“ethos” humain... dont le commandement de l’amour est le sommet »
La recherche de la communion nous guide dans la construction de la solidarité : « Le phénomène culturel, social, économique et politique contemporain de l’interdépendance, qui intensifie et rend particulièrement évidents les liens qui unissent la famille humaine, met une fois de plus en relief, à la lumière de la Révélation, un nouveau modèle d’unité du genre humain dont doit s’inspirer en dernier ressort la solidarité. Ce modèle d’unité
suprême, reflet de la vie intime de Dieu un en trois personnes, est ce que nous chrétiens désignons par le mot “communion” » (Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église, §33. Citant Sollicitudo rei socialis.). La Pensée Sociale Chrétienne nous invite à agir au niveau de chacune des deux réalités de
la solidarité : personnelle avec l’attention au prochain et collective au niveau des organisations.
a/ L’attention à son prochain
« Le mot ‘‘prochain’’ dans la société du temps de Jésus indiquait d’ordinaire celui qui était le plus proche, son voisin.
On considérait que l’aide devait aller en premier lieu à celui qui appartient au même groupe que soi, à sa propre race. Un Samaritain, pour certains Juifs de cette époque, était considéré méprisable et impur, et on ne l’incluait pas parmi les proches qui devaient être aidés. Jésus, juif, transforme complètement cette approche : il ne nous invite pas à nous demander qui est proche de nous, mais à nous faire proches, prochains. (...) Donc, je ne dis plus que j’ai des ‘‘prochains’’ que je dois aider, mais plutôt que je me sens appelé à devenir un prochain pour les autres. (Fratelli tutti, §60 et 61) »
b/ L’attention aux structures sociales et politiques
Nous sommes dans le champ de la charité politique. « Un individu peut aider une personne dans le besoin, mais lorsqu’il s’associe à d’autres pour créer des processus sociaux de fraternité et de justice pour tous, il entre dans le champ de la plus grande charité, la charité politique » (Fratelli tutti, §180 - Pie XI, Discours à la Fédération Universitaire Catholique Italienne (18 décembre 1927) – Pour bien comprendre ce qu’est la charité politique, voir Fratelli Tutti §186 : « - Si quelqu’un aide une personne âgée à traverser une rivière, et c’est de la charité exquise, le dirigeant politique lui construit un pont, et c’est aussi de la charité. Si quelqu’un aide les autres en leur donnant de la nourriture, l’homme politique crée pour lui un poste de travail et il exerce un genre très élevé de charité qui ennoblit son action politique. »)
Nous sommes au cœur de la construction du bien commun. « La charité sociale nous fait aimer le bien commun et conduit à chercher effectivement le bien de toutes les personnes, considérées non seulement individuellement,
mais aussi dans la dimension sociale qui les unit » (Fratelli tutti, §182, Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église, §. 207)
C’est là toute la noblesse de l’action politique (« Le monde peut-il fonctionner sans la politique ? Peut-il y avoir un chemin approprié vers la fraternité universelle et la paix sociale sans une bonne politique ? » Laudato SI §189) « L’amour doit être présent dans tous les rapports sociaux et les imprégner. En particulier, ceux qui ont le devoir de pourvoir au bien des peuples doivent s’appliquer à nourrir en eux-mêmes et à faire naître dans les autres, depuis les plus élevés jusqu’aux plus humbles, la charité, reine et maîtresse de toutes les vertus. (…) Cet amour peut être appelé “charité sociale” ou “charité politique” ou “amour social” et doit être étendu au genre humain tout entier. (Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église §581.) »
Cette capacité à générer de la solidarité devrait être un critère majeur de l’évaluation de nos organisations : « La solidarité doit être saisie avant tout dans sa valeur de principe social ordonnateur des institutions, en vertu duquel les « structures de péché » qui dominent les rapports entre les personnes et les peuples doivent être dépassées et transformées en structures de solidarité, à travers l’élaboration ou la modification opportune de lois, de règles du marché ou la création d’institutions. (Compendium §193) »
Insistons ici sur l’ouverture, l’accessibilité de ce chemin de transcendance : quel que soit son état, sa culture, son
La solidarité dans l’entreprise niveau d’éducation, chacun peut emprunter les chemins humains solidaires et répondre à l’appel qui lui est fait. Pourtant, l’individualisme et l’indifférence menacent aussi chacun, rendant aveugles ou sourds aux mêmes appels. Sur ce chemin de transcendance, la solidarité a besoin de s’enraciner dans le cœur de l’homme qui recherche la transcendance. « C’est dans la dimension intérieure de l’homme que s’enracine, en définitive, l’engagement pour la justice et la solidarité, pour l’édification d’une vie sociale, économique et politique conforme au dessein de Dieu. » (§40)
C’est la raison pour laquelle, « l’homme est aliéné quand il refuse de se transcender et de vivre l’expérience du don de soi et de la formation d’une communauté humaine authentique orientée vers sa fin dernière qu’est Dieu. Une société est aliénée quand, dans les formes de son organisation sociale, de la production et de la consommation, elle rend plus difficile la réalisation de ce don et la constitution de cette solidarité entre les hommes » (Compendium de la Doctrine Sociale de l'Église §47, Centesimus annus §41.)
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